Billie Holiday Médiathèque de Tassin mardi 21 avril 2015 Aucun commentaire


Le 7 avril dernier, Eleanora Fagan alias Billie Holiday, aurait eu 100 ans,

comme Muddy Waters... l'occasion de rendre hommage à cette grande dame du jazz & de revenir sur ce destin hors du commun et cette vie chaotique.

Billie Holiday, c’est d'abord une incroyable voix dotée d'une sublime expressivité, une interprète très créative et d’une grande sobriété, capable de réinventer n’importe quelle chanson. Elle restera pour beaucoup comme l'une des plus grandes chanteuses de jazz...

Baltimore & Billie Holiday en 1917


Née à Baltimore en 1915 de parents immatures, l'instable Sadie Fagan, 19 ans, et Clarence Holiday, 17 ans & jazzman en permanence sur les routes, Eleonora Fagan eut logiquement une enfance plus que mouvementée. Elle est fascinée dès son plus jeune âge par le jazz qu'elle entend dans les maisons closes où travaille sa mère.

Abandonnée par son père & le plus souvent livrée à elle-même, la jeune Eleonora oublie vite l'école, vole régulièrement, se retrouve en maison de correction & sera placée à 10 ans par l'administration dans une famille d'accueil.

A 13 ans sa mère l'emmène à New-York afin d'y refaire sa vie. Mais quelle vie ! Habitant toutes les deux une maison close de Harlem, les passes, les hommes, la violence, les problèmes avec la justice deviennent dès lors le quotidien de l'adolescente.


En pleine prohibition, la jeune fille découvre les joies des boîtes clandestines de Harlem où elle s'enivre de jazz, mais aussi de whisky. Sans aucune instruction musicale mais dotée de qualités vocales exceptionnelles, la jeune Eleonora se fait engager comme chanteuse dans divers clubs new-yorkais.

Ses idoles de l'époque sont Louis Armstrong et Bessie Smith, qu'elle imite à merveille.

En référence à Billie Dove, une actrice américaine du cinéma muet, elle choisit à 15 ans son nom de scène : Billie. On dit aussi que "Bill" était le surnom que lui donnait son père, s'amusant de son garçon manqué de fille !

En 1933, à l'âge de 18 ans, elle est repérée par un producteur de la Columbia, séduit par sa voix unique. Elle enregistre ensuite son 1er disque sous la direction de Teddy Wilson puis intègre l'orchestre du clarinettiste surdoué Benny Goodman.


Swing Street, the street of jazz

Dès lors, tout s'enchaîne, elle est sollicitée par tous les clubs de la "rue du swing" puis se produit au mythique Apollo Theater, le temple de la musique afro-américaine de Harlem.






Elle chante avec les plus grands : Duke Ellington, Miles Davis, Lester Young. En ce dernier, elle trouve un frère. Il la surnomme "Lady Day", elle l'appelle "President", ou "Prez". Le duo de choc enregistrera plus de 50 morceaux !

En 1935, à peine âgée de 20 ans, elle a déjà bon nombre de standards à son actif : "What a little moonlight can do", "Miss Brown to you", "It's like reaching for the moon", "I cried for you", "Billie's blues", "I'll get by". Elle devient dès cette époque l'une des vedettes incontournables du jazz mais sombre avec le succès et l'argent vers la débauche & les soirées trop souvent arrosées...



Au sommet de la gloire (elle vient de signer un contrat avec le label Vocalion records et elle est la première artiste noire à fouler la scène du Metropolitan Opera), Lady Day, 21 ans, est initiée à l'opium et à l'héroïne !

Malgré la drogue, Billie tient le coup & assure ses concerts, mais en 1947, elle se retrouve en prison pour possession de stupéfiants. La voilà derrière les barreaux pour un an et un jour.

Mais son public ne l'abandonne pas, elle triomphe au Carnegie Hall qui affiche complet. Ses longs gants blancs ne cachent plus les traces d'injection sur ses bras, ses cheveux ornés de ses éternels gardénias,  elle sort sa plus belle voix et c'est un triomphe.




Malheureusement, Lady Day replonge puis remonte la pente avec l'aide de Louis McKay. Après le succès de "Billie Holiday sings" (1952), elle réalise son vieux rêve d'une tournée en Europe, dont elle revient enchantée pour mieux replonger.
En 1956, Billie est de nouveau arrêtée avec de la drogue mais s'en tire en épousant Louis McKay.

Sa santé se dégrade à vue d’œil et sa tournée européenne de 1958 est un désastre ! Françoise Sagan, amie & fan invétérée de la chanteuse, évoquait dans son roman autobiographique de 1984 "Avec mon meilleur souvenir" le tragique destin de Lady Day.






En février 1958, elle enregistre son avant-dernier opus, "Lady In Satin", l'un des albums jazz les plus connus. Dernier chant du cygne majestueux, ce disque est une merveille.

Atteinte d'une cirrhose, elle tente en vain d'arrêter de boire puis apprend la mort de son ami de toujours, Lester Young, en mars 1959. Ce qui n'arrange en rien son état. "La prochaine, c'est moi", dit-elle.


Après s'être effondrée chez elle le 30 mai 1959, elle est hospitalisée au Metropolitan Hospital de Harlem. Cirrhose, insuffisance rénale et souffle au cœur ne l'empêche pas de continuer à se droguer.

Quand une infirmière découvre un sachet de drogue, sa chambre est perquisitionnée, son téléphone coupé et deux policiers la surveille en permanence ! A la fin de sa convalescence, elle retournera en prison, c'est sûr...

Mais à 44 ans, le 17 juillet, elle s'en va pour toujours.....Certains prétendent qu'elle s'est laissée mourir pour ne pas retourner en prison.

Le 21 juillet 1959, trois mille personnes se bousculent à la cathédrale St. Paul. Elle est enterrée au cimetière St. Raymond, dans le Bronx, dans la même tombe que sa mère.





Femme libre, Billie Holiday fût, bien avant le mouvement des droits civiques, la porte-parole de la cause afro-américaine, notamment avec la chanson "Strange fruit" (1939) qui dénonçait le lynchage des noirs dans le Sud des Etats-Unis. Les fruits étranges étant bien entendu les cadavres des pendus.




Adapté d'un poème de Abel Meeropol, la chanson fût revisitée de très nombreuses fois, que ce soit par Kanye West, Jeff Buckley ou encore Tricky.

L'hebdomadaire Télérama a récemment publié un excellent article sur le sujet :



Billie Holiday a fortement marqué le paysage de la musique contemporaine, habitant les morceaux qu’elle chantait avec une intensité rare, laissant l’émotion et les différents sentiments qui la traversaient comme seuls maîtres à bord.

Beaucoup d’artistes se sont fendus de reprises de Lady Day : Amy Winehouse, Stevie Wonder, Diana Ross ou Aretha Franklin ont tous essayé d’habiter les titres d’Holiday, n’arrivant pourtant jamais à atteindre son degré de sensibilité. D’autres ont préféré l’hommage en musique en composant des morceaux originaux, à l’image de Lou Reed, qui lui dédie en 1973 un titre de son album "Berlin" (1973), ou encore Gil Scott-Heron, qui rend deux hommages en un avec son morceau "Lady Day & John Coltrane" (1971).

L'an dernier la canadienne prolongeait la grâce et l'engagement de la divine Lady Day avec ce bel hommage.

Molly Johnson "Because of Billie" (Universal / 2014)


Plus récemment, la chanteuse Cassandra Wilson célébrait le centenaire de la naissance de Lady Day avec son opus "Coming forth by day".

Le crooner de Minneapolis José James, lui, sortira le 11 mai prochain chez Blue Note "Yesterday I had the blues : the music of Billie Holiday", un nouvel hommage avec 9 titres du répertoire de Billie Holiday.


http://www.mediatheque.tassinlademilune.fr/medias/search.aspx?instance=EXPLOITATION&SC=Catalogue&QUERY=cassandra+wilson%29#/Search/{%22query%22%3A{%22CloudTerms%22%3A[]%2C%22FacetFilter%22%3A%22{\%22_20\%22%3A\%22Holiday%2C+Billie\%22}%22%2C%22ForceSearch%22%3Atrue%2C%22Page%22%3A0%2C%22QueryString%22%3A%22billie+holiday%22%2C%22ResultSize%22%3A10%2C%22ScenarioCode%22%3A%22Catalogue%22%2C%22SearchLabel%22%3A%22%22%2C%22SortField%22%3A%22DateOfInsertionE_sort%22%2C%22SortOrder%22%3A0}}

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