Métrophonie, attention les oreilles ! Médiathèque de Tassin mardi 8 septembre 2015


Le projet "Métrophonie" a invité les habitants à collecter des sons sur le territoire métropolitain...

C'est l'occasion pour la médiathèque de faire écho à cet évènement et à vous proposer sa sélection musicale !

Dans le cadre des journées européennes du patrimoine, la Métropole de Lyon et l’Auditorium-Orchestre national de Lyon, ont proposé aux habitants de l’agglomération de participer à la création d'une bande originale, à partir de sons enregistrés sur le territoire et notamment à Tassin La Demi-Lune...
Vous pouvez retrouver le déroulement complet du projet ici

Les groupes de musiques actuelles de l'école de musique vous proposent à cette occasion un concert improvisé à l'Atrium le 19 septembre 2015 à 18h. (Gratuit sur réservation)




Le passage des sons enregistrés par les habitants à une « symphonie » ne s'est pas fait tout seul !

Kevin Henaff et Alexandre Hervé, designers sonores récemment diplômés de la Martinière Diderot, ont créé la bande originale finale, vous pouvez voir comment ils ont travaillé sur le projet ici, et  écouter la bande originale de la métropole. Un petit avant-goût de ce qui vous attend à l’Auditorium – Orchestre National de Lyon, les 19 et 20 septembre !

Ils vous présentent également le dispositif interactif qui sera installé dans la Proton et qui vous permettra de recomposer le paysage sonore à la manière d’un chef d’orchestre.



Théo Rota, compositeur, expose sa démarche autour de la création de l’identité sonore de la Métropole de Lyon. Il est celui qui reçoit et traite tous les sons que vous lui envoyez !





Ce projet passionnant est l'occasion de revenir sur la grande aventure de la musique bruitiste et de ses acteurs d'hier ou d'aujourd'hui au travers des collections de la médiathèque.

Tout "débute" en marge du mouvement futuriste fondé en Italie en 1909 par Filippo Tommaso Marinetti. Quatre ans plus tard, le compositeur Luigi Russolo publie "L’art des bruits". Dans son manifeste, Russolo prône un retour aux sons de la nature, aux bruits des villes et des machines & dénonce l’obsolescence des répertoires classique et romantique.

Luigi Russolo et Ugo Piatti avec l’Intonarumori.

Le premier concert bruitiste est donné à Milan, le 21 avril 1914, parmi les sifflements, les hurlements et le lancement de divers projectiles. La police interrompt le concert et la bagarre qui éclate entre les spectateurs et les futuristes... Attirant un public curieux & nombreux (parmi lesquels Igor Stravinski, Darius Milhaud, Maurice Ravel, Alfredo Casella, Piet Mondrian, etc.), d’autres concerts suivront rassemblant crépiteurs, éclateurs, bourdonneurs, strideurs ou encore bruiteurs…

Les bruiteurs ressemblaient à des grosses caisses de couleurs vives et reproduisaient le son de machines grâce à un système de manivelles et de sonnettes.
On entend ces fameux bruiteurs dans "Macchina tipografica" (1914) de Giacomo Balla :

 

Au cours de sa carrière, le compositeur italien ne cessa de concevoir un grand nombre d'instruments bruitistes et de machines sonores en compagnie d'Ugo Piatti. Ils mirent également en place un orchestre complet pour jouer le "Gran concerto futuristico" de 1917.

Constituant d'une certaine manière les bases du renouveau musical du XXe siècle, les théories développées par Russolo eurent une influence indéniable sur bon nombre de compositeurs.
C'est notamment le cas d'Erik Satie et de son célèbre ballet "Parade" (1917) en faisant appel à des sources sonores "concrètes" : sirène, moteur d'avion, machine à écrire, revolver, roue de loterie... Des instruments de musique inhabituels reprenant les théories futuristes qui mêlent bruitisme et machinisme.
Russolo a également inspiré l'italien Luciano Berio, fondateur du Studio di Fonologia Musicale, réputé pour ses travaux expérimentaux et son travail de pionnier dans la musique électroacoustique.

Dans la mouvance bruitiste, futuriste & dadaïste, le "Ballet mécanique" (1923-1925) de George Antheil devait à l'origine servir de bande son au film de Dudley Murphy et Fernand Léger. La partition intègre des instruments hétéroclites comme des timbres électriques ou encore une hélice d'avion.




Edgar Varèse se réclamait aussi du manifeste futuriste de 1913, rêvant d’un renouvellement de l’alphabet musical. Il prône l'électrification des instruments lorsqu'il compose en 1933/1934 "Ecuatorial", une pièce mêlant instruments acoustiques, voix amplifiées & deux thérémines.




Ottorino Respigi compose "Les Pins de Rome", en s'inspirant des Intonarumori de Russolo. La musique concrète se développe dès les années 1940 autour de la prise de son, de l'enregistrement et du travail autour de cette "matière sonore".

Pierre Schaeffer et Pierre Henry développeront les fondations esthétiques & théoriques de la musique concrète dans les studios de la RTF (Radiodiffusion-Télévision Française).

Pierre-Schaeffer & Pierre-Henry

Pierre Henry composera quelques années plus tard pour Maurice Béjart, "Messe pour le temps présent", avec le fameux "Psyché rock".

Cette oeuvre contemporaine, qui est probablement la plus connue du grand public avec ses sons électroniques et ses cloches, sera donnée sur scène pour la première fois à Nanterre les 3 et 4 octobre prochains.



S'inscrivant dans la continuité des bruitistes, Pierre Schaeffer et Pierre Henry, mais aussi Iannis Xenakis ou encore Karlheinz Stockhausen expérimentent & intègrent à leurs compositions des synthétiseurs, des bandes magnétiques, donnant ainsi naissance aux premières formes de musique électronique par le biais des prémices de la musique concrète et la musique électroacoustique.

Débordant le strict cadre de la musique savante, le bruitisme donnera naissance quelques années plus tard au mouvement de la musique industrielle. Fondé au milieu des années 1970 par le groupe Throbbing Gristle, le label Industrial Records scelle la naissance du mouvement et lance au monde son slogan provocateur & transgressif, "musique industrielle pour peuple industriel". Cette première vague industrielle voit émerger des groupes comme Cabaret Voltaire, dans une veine dadaïste et post-punk, puis Einstürzende Neubauten, Psychic TV, Coil, etc.

L'excellente compilation "Berlin 61/89 : wall of sound" (Le Son du Maquis, 2010) permet une bonne approche du mouvement en Europe. Outre le courant krautrock, on y découvre le rock futuriste ou la pop bruitiste de groupes comme Faust, Amon Düül II, Can, Neu!, The Young Gods ou encore les mythiques Einstürzende Neubauten qui utilisent des bétonnières, des tronçonneuses ou des marteaux piqueurs comme instruments !

Toujours du côté du rock, outre le "Music metal machine" (1975) de Lou Reed, Sonic Youth  intègre dès 1981 le concept de bruitisme à ses compositions punk-rock, rejetant ainsi les schémas classiques du rock et défendant haut et fort la déstructuration, l'improvisation & la dissonance.




Chaotique, abrasive & atonale à ses débuts, la musique du groupe new-yorkais influencera toute la scène noisy et le mouvement britannique shoegazing, représenté par des groupes comme My Bloody Valentine, Yo La Tengo, The Jesus and Mary Chain, etc.




Compositeur, multi-instrumentiste, chef d’orchestre, arrangeur et cinéaste, le parisien Christophe Chassol est un génial touche à tout et avec plus de 1300 œuvres à son actif, aucun style musical ne semble lui avoir échappé (pour le cinéma & la télévision, et quantité d'artistes comme Sébastien Tellier, Phoenix, Frank Ocean, etc.).

Inspiré notamment par Steve Reich et d'une certaine façon du bruitisme de Russolo , il a développé une technique particulière : l’harmonisation ou l’ultrascore, soit une mixture de musique minimaliste, de collage, de sampling et de rythmes pop.

Le plus simple est de l'écouter lui-même expliquer son approche de la création musicale, à l'occasion de la sortie de son dernier opus "Big sun" (Tricatel, 2015) :



Des sons concrets enregistrés aux quatre coins du monde, il extrait des lignes mélodiques. autour desquelles il construit des accords, une structure, des rythmes, des sons, des boucles & parvient en quelque sorte à faire "groover la musique concrète" !

Mais Chassol ne travaille pas uniquement à partir de "matériaux" sonores collectés par ses soins, il exploite l'énorme bibliothèque de sons & d'images qu'est le web, notamment via YouTube.

Illustration ci-dessous avec un discours de campagne de Barack Obama :



Retrouvez notre playlist "bruitiste" ci-dessous et notre sélection d'albums disponibles à la médiathèque :






Découvrez également SoundHunters, une expérience documentaire interactive dont l'ambition est de “sampler” le monde pour le mettre en musique.


Initié par Arte, le projet transmedia se déploie sur différents supports pour toucher différents publics. 


Comprendre, découvrir, expérimenter, partager. Le projet se décline en trois parties : un site web, une application et un documentaire TV de 52 minutes.

Vivez l’aventure à travers trois étapes : WATCH, REC et CREATE.
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